J'habitais dans le sud à l'époque, je suis allée voir un/une professionnelle habitant dans une grande ville commençant par A. Le pseudo du professionnel, pour ce post, sera Titi.
En 2017, ma contre nécessite une enture, en remplacement de la précédente (très certainement faite en 2004 par un luthier Polonais qui avait restauré cette basse que j'ai achetée à Jean Auray en 2008) qui avait lâché au niveau de la tête suite à impact.
Je vais donc chez Titi, devis effectué en février 2017, qui mentionnait l'enture + un chevalet neuf.
Je récupère la basse après quand même un long délai, on peut voir sur cette vidéo de juin 2017 que les retouches au niveau de la tête n'avaient pas été encore faites. Donc de février à juin... j'ai du la récupérer en mai.
Quand je récupère la basse, j'avais complètement zappé cette histoire de chevalet. Je teste la basse, les cordes sont à 2 cm de la touche, avec les molettes de mon ancien chevalet complètement vissées en bas, ce qui était bien évidemment pas du tout en accord avec les côtes d'avant le travail. Titi m'affirme que les côtes du renversement ont été scrupuleusement respectées, mais que voilà, une basse ça bouge, c'est pas grave, Titi taille le chevalet, donc je me retrouve avec un chevalet quand même assez bizarroïde, plus trop proportionné. Mais je ne fais pas plus gaffe que ça, bon... Titi a tendance à beaucoup parler d'une manière générale, de mon point de vue ça noie beaucoup le poisson dans l'eau (c'est quelque chose que j'avais déjà noté bien sûr, mais bon..) et moi je peux avoir un côté bonne poire.
Puis Titi me vante ça technique du talon en 3 parties, en me disant que c'est hyper solide, c'est fait à fil croisé. Bon Ok, écoute... mes connaissances de lutherie sont loin d'être suffisamment pointue pour pouvoir discourir sur le truc.
On voit bien qu'il y a 3 tronçons au niveau du talon. Titi me dit que l'ajustement précédent était assez naze, et c'est vrai que quand je récupère ma basse avec cette assemblage à 3 parties, je valide le fait que la conduction solidienne du son est nettement améliorée, donc youpi.
Bon Voilà... j'avais total zappé la fourniture du chevalet neuf (350 balles dans l'escarcelle de Titi), et vu que j'avais une meilleure réponse de l'instrument j'ai validé.
2 ans après, Gaël McKeon, que certains ont connu ici, voit ma basse, avise le talon et fait "ouhla... c'est quoi ce truc". Il ne s'éternise pas sur le procédé, juste il me dit que jamais il n'a vu ça et que c'est pas bon. Gaël McKeon est un luthier américain qui est resté 2 ans en France et qui est un killer fini.
Au mois d'août 2023, ma basse doit être défondée pour recoller les barres de tensions du dos, et finalement, c'était pas mal car Vincent Busson a pu bien revoir des endroits un peu craignos.
Et il m'envoie cette photo de l'arrière du talon, on est donc là sur le travail réalisé par Titi. V. Busson ne critique pas, juste il me fait parvenir le cliché.
En gros, c'est de la merde, j'ai pas besoin qu'on me le dise pour le voir.
Suit un échange de mails surréalistes avec Titi, dont je vous copie les passages remarquables de ses réponses :
le luthier spécialiste aurait du te dire que à l’arrière du manche dans un enclavement on fait un chanfrein (un biais taillé à la base du manche , et c’est pour cela que à la base de l’enclavement tu vois la colle , il s’agit du surplus qui va se loger là dedans donc c’est fait exprès . Si quelqu’un gratte cette colle il va voir la base du manche qui plaque comme il faut . Si ca ne plaque pas le collage ne tient pas.
Ensuite se fais l’ajustage des cotés au mieux pour ne pas manger les éclisses. l’instrument n’a pas bougé ni c’est décollé. mon parti pris était de ne pas rajouter de l’épicéa dans le tasseau car je voulais garder de l’épaisseur au talon.
Ensuite, les talon en deux ou trois parties se font beaucoup sur des basses allemandes, les français, anglais etc. font des talons entiers en général. Sur les instruments nouveaux en général on fait une pièce actuellement mais dans le temps ce n’était pas comme ça. Moi j’ai appris à faire de cette manière sur les allemandes, je trouve la solution fondée mécaniquement, sinon pourquoi je me fais chier à faire des collages en biais? bref. peut être le luthier formé chez gage ne sait pas ça, ce qui est possible car j’ai appris cette technique en Allemagne.
une enture de manche est un manche neuf incrusté dans le cheviller original.Mona ajustage était parfait. la partie visible quand on défonde s’appelle l’arrière de l’enclavement, l’enclavement étant l’incrustation du bas de manche dans la caisse d’harmonie. Il n’est pas possible techniquement de noyer dans la colle chaude quoi que ce soit. le reste est sur le courrier de hier.
Mes enclavements sur ce genre d’instruments sont bas pour ne pas leur mettre trop de kilos. d’ou la limite basse…
Si je faisais du « mauvais travail » je n’aurais plus pignon sur rue au bout de 35 ans de travail, ni je serai maître luthier à l’heure actuelle.
Note bienque toutes ces explications j’ai bien voulu prendre le temps de te les écrire sur mon jour de congé, afin de continuer moi aussi de penser à toi de manière détendue.
ton instrument avait déjà une enture, qui n’avait pas tenu, donc le renversement original de cet instrument n’existait plus. J’ai mis donc le renversement que selon mes calculs il fallait mettre, sur un instrument de cette époque et de cette conception acoustique.
Et voici ma réponse (légèrement tronquée de ci de là, ça concernait des passages pour lesquels je n'ai pas fourni les réponses de Titi, donc pas franchement compréhensibles)
On n'est jamais assez vigilants... j'aurais du me douter qu'il y avait anguille sous roche quand ces dernières années, j'ai vu passer ici même deux annonces pour vendre deux basses de Titi, faites sur mesures pour les personnes. Quand t'as une basse de luthier à 10/12000 balles, et qu'elle sonne, qu'elle a été faite pour toi, tu ne vas pas chercher à la revendre...Suite à continuité d'investigation auprès de luthiers chevronnés spécialisés contrebasse, j'ai acquis la certitude que cette histoire de talon de manche en 3 parties n'existe pas dans l'histoire de la contrebasse. J'ai même contacté un luthier Allemand qui a trente ans de métier (NB: Jonas Lohse), qui est en sus un historien de la contrebasse, et qui doit avoir une certaine connaissance des pratiques de lutherie de son école.
Sa réponse est, sans trop de surprise par rapport aux infos que j'ai glanées:
"You often see small parts added to the neck heel, usually not more than 3-4 cm at the very end. At both old and new basses.
This saves otherwise perfect wood blank for making a necks, if it’s a little bit too short at the neck heel area. I’ve never seen more than one piece added."
Pour le reste, voici mes contre argumentations à tes dires:
1 - Cette histoire de chanfrein ne semble pas être beaucoup pratiquée, voire jamais (après contact de 5 luthiers). C'est de toute manière peu défendable, tant on souhaiterait trouver un ajustement parfaitement plaqué à cet endroit (comme à tous les autres endroits d'ailleurs), histoire d'avoir une transmission solidienne du son optimisée ;
(...)
3 - Que tu aies appris cette technique de "plusieurs morceaux" en Allemagne dans un atelier (je veux bien les coordonnées, pour les interviewer sur cette technique étrange) ne fait pas de cette technique une chose courue, pour peu que cette technique existe bel et bien ailleurs qu'à XXX. Pourquoi "se faire chier" (comme tu le dis) avec plusieurs tronçons même pas mortaisés, en effet, ça... je me le demande... Peut-être que le tasseau était tout à fait irrégulier et tu as préféré ne "pas te faire chier" en ajustant petits bouts par petits bouts... je ne sais pas... j'avoue être tout à fait perplexe. Ou bien une volonté de tester un truc. La prochaine fois, ce genre de test, si c'était l'idée, fais-le sur une de tes basses, c'est quand même plus sicure ;
5 - (...) Et ton argument de prix pourrait laisser suggérer qu'un petit prix implique un travail en 3 morceaux, c'est donner le bâton pour se faire battre ;
6 - Concernant la modification du renversement, je trouve tes arguments a posteriori un peu osés ;) Tu aurais fait le renversement actuel (considéré comme faible), "selon tes calculs". Hors, 1) une modification structurelle de ce type devrait d'abord être validée par le client. ça va changer le son, le jeu, et je trouve osé de ne pas informer le principal intéressé, et recueillir son consentement. On est là dans un cas différent d'un instrument à restaurer que fait le luthier pour lui et 2) si cela avait été VRAIMENT anticipé comme tu le dis, puisque tu parles de calculs préalables, tu aurais alors compté un chevalet dans le devis (NB: c'est après, en relisant le devis, que je me suis rendue compte que le chevalet avait été compté). Hors, quand je suis venue le jour J à l'atelier pour récupérer l'instrument, et aviser de la trop haute action alors que les molettes éteint au plus bas, tu as baragouiné un truc du genre "oui mais tu sais, ça bouge...", et de couper les jambes du chevalet d'un bon centimètre quand même pour finalement me retrouver avec un chevalet non adapté et de plus, avec la molette côté aigu mise de traviole. Quid de calculs préliminaires, donc dune modification de renversement intentionnelle comme tu l'affirmes dans tes mails, si c'est pour remonter l'ancien chevalet qui va être trop haut?? Et pour un Maître Luthier proclamé, que le client reparte avec un chevalet non adapté car non anticipé... ça fait désordre. De plus, tu m'avais affirmé que tu avais reproduis les côtes à l'identique. Et que l'action basse venait d'un mouvement de la table etc etc. Tout ça est tellement contradictoire.
7 - Le luthier de cet été n'a pas besoin d'explications, c'est moi qui ait besoin d'explications. Il ne m'a qu'envoyé une photo de l'enclavement, pour le reste je n'ai pas besoin d'être chaperonnée par quiconque, et tu as scénarisé à l'envie un concurrent qui te taperait du sucre sur le dos par client interposé, ce qui est tout à fait en dehors de la réalité. Par contre, que je prenne le temps de contacter des spécialistes et poser des questions, ça oui.
8 - Tu dis ceci aussi: "Si je faisais du « mauvais travail » je n’aurais plus pignon sur rue au bout de 35 ans de travail, ni je serai maître luthier à l’heure actuelle. " Ta clientèle est essentiellement composée d'élèves du conservatoire. J'ai même vu un jour un gars venir pour faire accorder son violon... c'est dire le niveau des personnes qui te confient leurs binious. (...) Le cabinet MacKinsey aussi a pignon sur rue, et selon qqs personnes, "ils font du très bon travail".... Et venir me mettre ton CV devant les yeux avec "je suis maître luthier" est assez croustillant. La procédure est essentiellement administrative pour ça : monter un dossier avec des justificatifs, passer devant un jury qui examine le dossier et pose des questions, il n'est même pas question, dans la procédure de présenter une œuvre produite pour l'occasion, ou une œuvre produite d'une manière générale.
9 - Tu dis qu'il faudrait faire plein de photos histoire de ne pas être enquiquiné par la suite. Je trouve qu'il faudrait enregistrer toutes les conversations pour pouvoir ressortir, par exemple, celle du chevalet trop haut et des côtes qui avaient été pourtant scrupuleusement respectées (point 6), ce qui ne va pas du tout avec des "calculs préliminaires que tu aurais faits" comme tu l'affirmes dans tes récents mails.
Mais ok, Maître.
Je suis désolée et meurtrie de vous avoir incommodée avec mes réclamations 6 ans plus tard, mais tellement ravie et honorée de savoir que l'infâme vermisseau que je suis a obtenu des réponses du Maître, réponses qu'il a rédigées en prenant sur ses jours de congés. Tout ça étant, à mon sens, une vague tentative pour faire culpabiliser et surtout, pour rabaisser la personne dans la pure tradition de "je suis bien gentille, moi Maître, de prendre du temps pour te répondre".
Bien à vous Maître
Voilou. J'ai un peu les bollocks quand même. J'ai fait un signalement à Verspieren, mais il était trop tard. J'ai juste la satisfaction de les avoir mis au courant.