gromer a écrit : ↑03 janv. 2018, 18:35
D'abord sur le terme en français: 2 notes par mesure, c'est une pompe?
Normalement, oui, 2 notes par mesures c'est à dire 2 blanches par mesure c'est une pompe. Two feel ou half beat.
je suis pas degourdie, bon, mais comment on passe, mentalement, de ce deux aux 4 noires du walking? je peux le faire sur un petit bout de machin, il faut sentir le decrochement rythmique mais c'est pas de ça que je parle, plutot l'idée de "penser walking" Essklère?
Est-ce qu'il y a un batteur dans le groupe? Si oui, le feeling half beat puis passage en walk se fait en couple avec lui. Si ya pas, il y a quand même, chez le/les soliste(s) aussi une manière de faire sentir qu'ils jouent/phrasent sur du
half puis suivent ou annoncent le passage en walk (4 noires) proprement dit. Mais si tout le monde débute, c'est facile pour personne...
je bosse autumn leaves, avec ma lenteur d'escargot et les rouages qui grincent, pour detricoter le jeu quasi reflexe d'alterner index et petit doigt.
Tu parles de la main droite? Dans ce cas, ce serait index -majeur..
Le truc de faire sonner en blanches minimalistes Tonique/quinte comme tu décris de Ray Brown c'est justement un des trucs les plus difficiles à faire, même si on reproduit copie conforme d'après le CD. Et surtout, le bassiste il n'est pas tout seul!! Tout le monde joue ensemble, et ça s'emboite. Si tu isoles une ligne de basse issue d'un CD et que tu la reproduis telle quelle, ça peut le faire... mais ça peut aussi tomber un peu à plat.
Et avec ces gus là... Ray Brown et Lester Young ils sont capables de faire sonner la pire des bouses écrite par un schizo manchot et amoureux de sa mère à 50 piges.
Dans un groupe où tout le monde débute plus ou moins, déjà faut apprivoiser l'instrument, les codes, et le pire du pire qui est tellement souvent zappé: je fais de la musique avec les autres. Chacun se nourrit et nourrit le reste. Mais ça demande d'être ok de mettre l'intention sur cet état de fait, d'avoir le background humain pour rentrer en relation avec autrui de cette manière. Si tout le monde bataille en urgence avec les difficultés techniques de la pièce à jouer + le biniou, et des peaux de bananes dans les oreilles, c'est super galère à réaliser.
Combien de fois je suis sortie de gigs, triste comme un saule, parce que chacun joue dans son coin, même si c'est hyper maitrisé niveau technique.
Et l'improvisation dans tout ça? le nombre de gens qui te disent " le jazz c'est l'improvisation".
Nop (
mode catégorique pour de rire). Le jazz c'est une espèce de spontanéité musicale à partir d'un système hypra codifié

Et le jazz c'est, à mon sens, surtout de l'interplay.
Mais.
L'improvisation requiert un taf IMMENSE d'acquisition des codes pour pouvoir danser autour d'eux, c'est ce qui donne l'illusion de l'improvisation. On ne se jette pas là dedans sans avoir balisé le terrain à fond. Donc y'a pas d'improvisation à ce niveau

Et l'interplay s'acquiert avec la pratique, sur du long cours. Et parfois, l'interplay, en fonction des zicos avec lesquels on joue, bin ça marche plus ou moins bien.
Au States, pays d'origine, la méthodologie est la suivante. Le mec veut jouer du jazz et de la contrebasse, par exemple, il est dans une bonne école, avec un bon prof. Imaginons qu'il a déjà un peu d'aisance techniquement parlant. On va lui faire apprendre cette musique chronologiquement. D'abord les mecs qui faisaient la pompe. Puis on passe à Jimmy Blanton, Oscar Pettiford, Ray Brown, Paul Chambers, etc. On relève. Et on fait jouer "à la mode de". C'est à dire que le gars doit savoir faire un accompagnement et un solo à la mode de Blanton, de Chambers etc... c'est encore plus vrai chez les sax.
Les codes s'acquierent comme ça là-bas. Donc d'abord de la reproduction, puis de "l'improvisation" selon les codes précis d'une époque et d'un gars. La grammaire, le vocabulaire s'acquierent, et les types avancent comme ça.
Bon... on en est loin ici

Mais c'est pour dire. L'impro, c'est pas de l'impro. C'est une création spontanée avec une matière vivante ressassée 10.000 fois.