gromer a écrit :j'avais un peu flippé en lisant ton premier post de cette série. Comme si tout le boulot que je fais en ce moment était "de travers".
Je suppose que tu parles d'une de mes interventions?
Quand je prends la parole, évidemment je défends une manière de pratiquer en vue d'avancer et de s'améliorer que j'utilise moi-même et qui a fait ses preuves sur moi ou sur d'autres (je ne suis pas la seule à avancer dans la musique en me servant de ce genre d'exos). Cette manière de pratiquer est une porte d'entrée vers: faire de la musique, c'est à dire, surtout, je pense: comment laisser s'exprimer la musique que l'on a en soi. Et je réagissais à des posts de ci de là qui ne parlent que technique: où mettre les doigts, comment les mettre pour jouer juste, travailler avec l'accordeur. Si tu te souviens bien, ma première intervention dans cette discussion était sur "comment jouer quelque chose en étant juste (doigtés et intonation) si on ne l'entend pas au dedans de soi" (==> Autrement dit:
je veux faire pousser des tomates. Je plante des graines de tomates, mais je n'ai aucune idée à quoi ressemble une tomate. Quand elle aura poussé, autant je ne vais pas la reconnaître... )
Donc en gros, au lieu de se dire "comment aller de tel point sur le manche avec tel doigt à tel autre point sur le manche avec tel autre doigt" (pratique visuelle et éventuellement kinesthésique) c'est de ce dire "c'est quoi la saveur de cet intervalle. C'est quoi la musique qu'il y a dedans. Comment ça chante ces deux notes, ces trois notes qui s'enchainent". Et si la justesse c'est trop dur à la contre, s'aider avec un clavier et le chant c'est quand même bien vu.
Voici le sens simplifié de tous ces posts. Et je parlais de l'impro libre pour sortir d'une tyrannie exercée par le rythme harmonique qui oppresse le débutant.
Et pour travailler les intervalles, ou se les approprier si travailler est un terme qui rebute, j'ai proposé une méthode, celle énoncée plus haut (ou ailleur sur l'autre fil que j'ai créé à partir de celui ci). C'est tout. Ne pas pratiquer celle-ci ne signifie pas être dans l'erreur. Mais pratiquer une manière de jouer sur l'instrument qui ne soit presque qu'orientée vers la technique (où sont les notes, comment s'appellent-elles, comment aller de l'une à l'autre) est un tue-l'amour bien rassurant.
Alors oui, la technique c'est un outil qui permet de donner corps à la musique qu'on a au dedans. Et tant qu'à faire, autant avoir des outils adaptés, de bonne qualité bien affûtés! J'aime avoir des outils adaptés, de bonne qualité et bien affûtés. Mais on peut créer un morceau (un vrai morceau) en impro sur les 4 cordes à vide et en faisant des glissandi aléatoires sur toute la touche histoire de démystifier le crédo fermement implanté: "si je ne sais pas où sont les notes, si je ne connais pas le nom des notes, si je ne suis pas juste, je ne peux pas jouer". La musique ce n'est pas que des notes qui s'enchainent (donc des variations dans le pitch) selon un code relatif à une esthétique donnée! La musique c'est aussi les dynamiques, les changements de
tempi, les variations de timbres, les variations rythmiques, les répétitions...
Mais bien sûr tout ça c'est comme des repas bien équilibrés, il faut manger de tout... C'est un des aliments possibles.
Le nombre de gens que j'entends dire "mais moi je ne suis pas musicien, ou je n'y connais rien en musique car je ne connais rien au solfège" ça me sidère. Cette anecdote n'est pas là pour illustrer quoi que ce soit de la discussion antérieure, c'est juste pour dire que dans les cultures détentrices de la musique savante, il y a beaucoup d'inconscient qui empêche beaucoup de chose vis à vis de la musique. Chez les musiciens issus de ces cultures aussi, faut pas se leurrer.
Ce que ça me suggére, c'est qu'une quinte ou une tierce ou..., ca ne prend de sens qu'à l'interieur d'une mélodie. Enfin, je ne l'entends qu'à l'interieur d'une mélodie.
Oui mais à la contrebasse, ou la basse, ça peut être handicapant. Quand tu fais un accompagnement derrière la mélodie, que tu dois jouer des quintes et des tierces, avant d'arriver à faire chanter le walkin (ou autre) et que ça sonne mélodie, c'est loin d'être gagné. Y'a une certaine forme de taf avant d'arriver à faire chanter des fondamentales et des quintes, je pense. Du taf et une certaine attitude intérieure consciente qu'une mélodie ça peut même se fourrer dans une demi-ton et rien d'autre, par exemple (voir les paramètres dynamiques, timbres etc... cités plus haut).
Et juste pour finir, un truc que tu dis gromer, de la différence qu'il y a "dans ma tête" et "dans ce que je sais faire"
En marchant dans la rue, un temps sur chaque pied et dans ta tête , la mélodie se met en place dans cet intervalle entre chaque pas
Dans ma tête je fais des solo de malade sur ma contrebasse. Dans ma tête j'arrive à relever les chorus de Keith Jarrett et je les joue sur la contre. C'est génial.
Dans la réalité, quand je prends le biniou, c'est bien autre chose. C'est cette réalité là dont on ne peut faire l'économie si on veut jouer de la musique (avec les autres).