J'ai suivi avec une admiration sans borne et un soupçon de masochisme le travail de YöÖ "Projet contrebasse maison" sur ce forum et ça m'a donné l'énergie de reprendre un vieux projet de construction d'après les plans de l'Amati proposés par Peter Chandler et son bouquin:" So ... you want to make a Double Bass".

Le bouquin posé sur le moule de la future...
J'ai racheté deux planches de noyer à un copain menuisier et les ai fait mettre d'épaisseur dans une fabrique de meubles pour obtenir les fournitures nécessaires à'un fond plat et des éclisses.

Comme il s'agissait d'un premier travail de ce style, j'ai renoncé à du bois de résonance et me suis borné à sélectionner soigneusement des poutres de chantier en sapin chez un grossiste pour faire la table.
L'avantage de tout amateur, outre qu'il peut mettre un temps illimité, réside dans l'absence de contraintes commerciales et la possibilité de sortir des sentiers battus. J'ai ainsi voulu essayer une méthode décrite dans "L'art du luthier" de Tolbecque qui consiste à cintrer une planche à chaud pour la partie centrale de la table et de coller deux pièces plus épaisses pour obtenir la surface nécessaire, puis de sculpter la voute. Avec mon système de poutres, j'ai en fait une table en cinq parties.

On voit bien le "pont" avec ses marques de cintrage; c'est du sapin de 13mm qui ne se laisse pas faire tout seul!

Dégrossisage à la meuleuse, puis à la gouge et au grattoir.
C'est là qu'on s'marre quand on travaille avec du papier de 24 sur une meuleuse et qu'on retouche simultanément la voute et le creux: au niveau des F je suis carrément passé à travers....
Merci à la formule en poutres de chantier qui met le petit coup d'impatience à portée de toutes les bourses.
Bon, bis repetita placet: retour à la raboteuse pour dresser parfaitement ce qui me restait de poutres au niveau des joints et re-cintrage d'une planche pour faire le milieu de table. Nouveau mouvement d'impatience, je cintre trop au moment du collage et ma voute finale fera six centimètres au lieu de 4,5 ! Le résultat est spectaculaire, la basse aura de la brioche mais m..... je ne recommence pas.
Je perce les trous des F avant de creuser la table, cela sert de repère.

Filetage selon la méthode de YöÖ avec un Dremel, aïe, aïe, c'est plus coton que ça en a l'air!
En fait, si je me relance dans un autre projet, je pense fileter après collage de la table et du fond et ajustement parfait des bords afin de garder une marge de manoeuvre à l'assemblage.
La boite à fromage est dégagée de son moule, les joints renforcés au parchemin, le sommier installé ainsi que les contre-éclisses. C'est un peu de traviole sans que j'en comprenne la cause mais bon, je me console en me rappelant de belles basses historiques à l'architecture tout aussi aléatoire



Là on saute plusieurs étapes: achat d'un manche chez Göetz avec une magnifique volute que j'ai légèrement retouchée pour la faire correspondre au plan, enclavement laborieux dans le tasseau supérieur en tentant de respecter l'angle voulu, collage de la touche Göetz, déjà bien dressée d'usine, mise d'épaisseur du manche à la meuleuse, puis à la rape, puis au rabot et et au grattoir. Pour finir, je fais des aller et retour en grands mouvements circulaires avec une feuille émeri entière collée sur une planche afin d'aplanir le reste de creux et bosses.
Le chevalet vient de chez Götz, le cordier est un modèle chinois en carbone.


Voici le résultat en bois brut! J'aime assez le contraste entre le blanc du sapin et de l'érable et la texture du noyer et pense conserver cet effet en traitant la table et le manche avec une lasure anti UV avant de vernir pour éviter leur jaunissement.
Et le son me direz-vous?
Bof...
Pour une grosse basse c'est vraiment décevant en puissance mais agréable de sonorité. Bon, malheureusement j'aime la puissance... donc après mon retour de vacances elle n'a qu'à bien se tenir, je suis capable de la transformer en allumettes jusqu'à ce qu'elle sonne!
Cela dit, si je lui trouve un look d'enfer, le plan n'est pas parfaitement respecté notamment en raison du cintrage imparfait des éclisses et de la conception du moule. La basse n'est donc pas tout à fait symétrique comme on le voit bien sur les clichés et la table trop creusée. D'autre part le pont au milieu de table ne semble pas un atout.
C'est peut-être pour cela qu'il y a des luthiers professionnels!
A retenir qu'il faut être dingue de bricole pour se lancer dans ce type de projet tant les étapes à dépasser sont nombreuses et ardues. De plus le prix des fournitures met l'objet au delà des premiers prix du commerce.
Au menu: faire un chevalet réglable pour vérifier l'incidence de l'angle du manche sur le son, retoucher l'épaisseur du manche, puis vernir.
A suivre si intérêt...

Et YöÖ, où en es-tu de ton projet? Je consulte régulièrement ton sujet sans dépasser la page 15! Donne-nous des nouvelles!