Patrick MANET a écrit : ↑27 mars 2021, 19:56
Ni les Beatles, ni Brassens, ni les manouches, ni les bluesmen, ni les joueurs de flamenco... et la liste serait très longue, ne savent/savaient lire la musique.
Comme dans toute forme d'enseignement, il n'y a pas un chemin meilleur que les autres, le bon est celui qui s'adresse à la forme d'intelligence et de sensibilité de celui qui le reçoit. Évitons les vérités absolues dans ce domaine.
Fais moi la grâce de croire, mon cher Patrick, que tout cela, je le sais bien.
Et aussi celle de penser que je ne suis pas un tenant des vérités absolues.
Mais je peux tout de même exposer mon point de vue
Si tu veux bien, prenons l'exemple souvent cité des manouches (je limite parce que la "longue liste" que tu évoques est... longue, justement, et que ce cas-là est bien typique de représentations courantes, mais à mon sens biaisées).
"Django ne savait pas lire une note de musique", dit-on.
C'est vrai.
Est-ce que ça l'a empêché d'être un génie de la musique ?
Certainement pas.
Mais quand j'entends dire des choses comme "je ne veux pas faire de solfège parce qu'on peut s'en passer, la preuve Django a été un immense musicien et li ne savait pas lire la musique" (je ne dis pas que tu l'as dit toi, je dis qu'il m'est arrivé d'entendre cette énormité, assez souvent même, comme toi je suppose), ça me fait plutôt rigoler.
Pourquoi ? Mais parce que Django était un génie, justement. J'imagine que tu connais l'anecdote : Duke Ellington demande à Django lors de sa tournée aux États-Unis, "Ce thème, vous le prenez dans quelle tonalité ?" Réponse : "N'importe. Commencez, je vous suis". En d'autres termes, Django était capable de transposer à peu près tous les standards dans n'importe quelle tonalité, instantanément, de chic, comme ça.
O.K., super.
Mozart était bien capable de noter de mémoire le
Miserere d'Allegri dans son entier, avec toutes les voix, en ne l'ayant entendu qu'une fois
Maintenant, quand c'est Gérard Chamoulot qui me dit qu'il ne veut pas faire de solfège parce que Django n'en faisait pas, ça veut dire que d'une certaine façon, quelque part, il croit qu'il est un peu Django. Et qu'un jour, il pourra prendre un standard dans n'importe quelle tonalité sans préparation. Allez, tiens, "Don't mean a thing..." En Do, en Sol, en Si b, en Mi b, en Fa, en La b. Et puis tiens, tant qu'on y est, en Do #. Vas-y p'tit gars !
Permets-moi de douter...
Autre chose : Django autodidacte.
Mais non.
Qu'il n'ait jamais mis les pieds dans une école de musique, c'est sûr.
En revanche il a appris à une école autrement rude, celle d'un entourage qui ne lui passait rien : gammes, arpèges, exercices de mécanisme, thèmes de bal musette (puisque c'est comme ça qu'il a commencé, rue de Lappe, à treize ans ; le jazz n'est venu qu'après). Quand on habitait la zone dans une roulotte du côté de la porte de Pantin , il fallait rapporter de la thune, pas question d'être feignant.
Enfin, dernière remarque : il a été un immense musicien, mais il n'a jamais joué que SA musique
Très belle musique, à coup sûr.
Mais celle-là seulement.
Il n'a pas enregistré le
Concerto d'Aranjuez.
Dommage.
Bien sûr, chacun pratique comme il l'entend.
Je n'ai jamais eu l'intention d'interdire à qui que ce soit de chanter en s'accompagnant à la guitare avec quelques accords appris sans solfège dans un recueil de tablatures, ni de jouer
Touchez pas au grisbi d'oreille à l'harmonica, ni de pianoter un boogie sans partition, "de routine", comme on dit joliment dans le Midi.
Mais il faut savoir ce qu'on veut : si on souhaite aller un peu plus loin (mais rien n'y oblige !), le solfège est sacrément commode.
Ne serait-ce que pour savoir déchiffrer les exercices d'une méthode d'instrument.
Et pour faire partie d'un ensemble, c'est-à-peu près indispensable.
Voilà. Je ne dis rien de plus, rien de moins.
Je finirai par un petit clin d'oeil à Maryse pour son soutien
